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Meilleurs vœux !

 Je souhaite           à tous les poissons rouges de quitter leur bocal           à toutes les fourmis ouvrières de s’émanciper           à toutes les vaches d’être sacrées           à toutes les chauves-souris d’être enfin des oiseaux           à tous les éléphants de pouvoir oublier           à toutes les sardines d’être un jour celle qui bouchera le port de Marseille           à tous les cochons d’Inde de trouver leur girafe
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La Cigarette

    Crédit image : Nick Knight Perdue dans ses réflexions elle a presque oublié la cigarette qu’elle tient. Mais bientôt elle lèvera les yeux vers les volutes de fumées, pour une chercher une solution, la solution. Elle y verra un enchevêtrement de formes qui reflète celui de ses pensées. Elle a espéré que la première cigarette du matin — ou est-ce la dernière de la nuit ? — lui éclaircirait l’esprit. Mais le tabac ne parvient pas à dissiper les vapeurs d’opium. Au contraire, il s’y mêle, accroît leur effet. Elle secouera la tête pour dégager des yeux presque aussi violets que son manteau. Mais sous la fulgurance de la couleur, son regard restera opaque, plongé à l’intérieur d’elle-même, plongé dans le souvenir de cette nuit, de toutes les nuits, qui se mêleront comme un film au montage chaotique. Est-ce cette nuit qu’elle a décidé de le quitter ? Cette nuit qu’elle l’a vu pour la première fois ? Cette nuit qu’elle a compris qu’elle ne resterait jamais plus d’un mois avec le même

L'Interview

— Jean-Jacques Dupont, pourquoi ce recours systématique, ou presque, à l’absurde dans votre œuvre ? — On peut parler d’absurde en effet, mais pas de l’absurde selon Camus, qui pensait l’homme condamné à chercher un sens à sa vie alors que d’après lui l’existence et le monde en étaient dépourvus, ce qui est profondément déprimant. Cet absurde-là, c’est peut-être celui contre lequel j’écris. Non que la vie ait un sens, mais il y a tant de moyen de ne pas y penser. Mon absurde est celui que les Anglais appellent le non-sense  : l’irruption, dans la vie de tous les jours, d’éléments qui ne sont pas à leur place et transforment radicalement, sans réalisme aucun, le regard que le lecteur porte sur ces personnages banals en y ajoutant cet humour absolument essentiel pour supporter la vraie vie. — Parce que la vie est insupportable ? — Vous êtes journaliste, vous avez fait votre travail d’enquête, et ce n’est d’ailleurs pas un secret très bien gardé. Jean-Jacques Dupont n’est pas mon nom

L'Heure du feuilleton

  Quel retournement de situation ! Monique était hilare. Qui aurait pu imaginer que le mari observait toute la scène depuis le placard ? Ce feuilleton l’enchantait. A 18h, tous les soirs, même quand elle avait des invitées, toute activité cessait et l’on s’installait sur le sofa en similicuir noir, devant la télévision. Hélène, de son côté, esquissait un sourire poli. Elle ne s’intéressait pas vraiment à ces vaudevilles, leur préférant les films d’épouvante, les histoires de possession et d’exorcisme. Tandis que ses yeux regardaient encore, plus par réflexe que par intérêt, le poste de télévision, elle prêtait l’oreille à Sylvie, qui, elle, ne faisait même pas mine de s’intéresser à l’action. Et ce que Sylvie racontait paraissait bien plus fascinant que ces histoires d’adultère sans surprises.  « — Vois-tu, c’est la voisine qui me l’a dit. Elle le tenait du beau-frère de son cousin. C’était une petite bourgade tout ce qu’il y a de plus normal, un café, une boulangerie, plus de bureau

Bleu ciel

Consigne : le texte doit commencer par la phrase suivante  « Ce peut être aussi cela l’existence ! Des miracles parfois, de l’or et des rires et de nouveau l’espoir quand on croit que tout autour de soi n’est que saccage et silence » (Philippe Claudel, La Petite Fille de Monsieur Linh )   Et pourtant, il n’y croyait pas. Il s’était porté volontaire par sens du service, parce qu’il savait que la plupart des survivants ne se sentirait pas la force de revenir. Lui, cette force, il l’avait. Il avait déjà fui sa ville, il y a longtemps de cela, laissant sous les gravats les corps de sa femme et de sa fille. Alors un désastre de plus, un désastre par lequel il n’était en outre que peu touché, n’étant que de passage dans cette bourgade aujourd’hui en ruines, qu’est-ce-que ça pouvait lui faire. En ruines, avait-il pensé. En cendre plutôt. Il ne restait à la verticale que quelques fragments de murs, les rares constructions en pierre, noires de suie. Il s’appuya sur l’un de ces empilements

IGNACE

  Image : film A One- Way Trip to Antibes , 2011 Consigne : (que je n’ai pas respectée) Prendre la place d’un des personnages   IGNACE Drame burlesque en une scène Les personnages se parlent à eux-mêmes. Tout dialogue entre eux sera indiqué comme tel   ELLE Je ne suis pas vraiment à l’aise de sentir ce papy collé à mon dos. Il avait l’air correct, mais avec les hommes, on ne sait jamais. Et s’il avait pris mon invitation à monter sur ma moto comme une invitation à autre chose ?   LUI Cette jeune femme est bien aimable. Et serviable. C’est rare chez les jeunes gens d’aujourd’hui. Je n’ai même pas eu besoin de lui faire signe, quand elle m’a vu sur le bord de la route avec ma valise elle m’a spontanément offert une place à l’arrière de son véhicule. Si j’avais le moindre intérêt pour les femmes… mais non, ce n’est pas moi. Même hétérosexuel je resterais une personne correcte.   ELLE Cette énorme valise déséquilibre ma bécane, je dois ajuster ma conduite. Mon esp